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Just the Wind (Benedek Fliegauf, 2012)

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Festival Paris Cinéma 2012 : en compétition

Grand prix du jury à la dernière Berlinale, Just the Wind représente tout ce que le jeune cinéma hongrois, si prometteur, ne doit pas être. Avec un discours tout à fait noble sur le papier, sur le traitement cruel réservé aux tziganes en Hongrie, le film semblait tenir du brûlot politico-social plutôt original et efficace. On déchante rapidement tant le réalisateur de Milky Way livre un film en tous points détestable à ranger aux côtés de tous ces films faussement subversifs mais vraiment maladroits, qui cherchent à dénoncer quelque chose en tombant dans les mêmes travers que leur sujet, voire pire. Avec sa mise en scène déplorable, son propos franchement douteux et son regard de voyeur, Just the Wind est une horreur comme on n’aimerait plus jamais en voir en provenance d’un pays dont le patrimoine cinématographique contient les œuvres d’un des plus grands réalisateur du monde. Si seulement Bela Tarr pouvait reprendre sa caméra plutôt que de laisser de telles ignominies représenter la Hongrie en festival…

 Just the Wind (Benedek Fliegauf, 2012)

A l’exception de ses acteurs très impliqués, tout est laid dans Just the Wind. Dans le cercle infernal et funéraire qu’il accomplit, s’ouvrant sur un enterrement et se fermant sur des cercueils, le film est portée par une telle maladresse qu’il en vient à cautionner ce qu’il cherche à dénoncer dans son carton d’introduction. Sans la moindre distance, dans le propos comme à l’image, Benedek Fliegauf filme une famille au bord de l’extinction pure et simple sans chercher à nuancer son regard, en abordant frontalement l’horreur qui rend l’image poisseuse et les destins dramatiques. Difficile de saisir d’où provient l’écart entre les intentions et le résultat, mais ce qui semblait être une charge contre la cruauté envers la communauté tzigane devient une peinture dégueulasse de la misère. Benedek Fliegauf n’épargne à peu près rien au spectateur, du patriarche sénile à la fillette qui n’a pas pris de bain depuis six mois dans sa famille de dégénérés, en passant par des décors jonchés d’ordure avec un enfant qui y cherche de quoi construire sa planque. Il aura beau s’en défendre, le réalisateur filme cette communauté comme des rebuts de l’humanité et pire, il les filme comme un de ces prédateurs inhumains dont il voudrait faire le procès. Volontairement ou pas, il choisit le camp de l’oppresseur et chaque bobine passant enfonce son film dans une vulgarité crasse et un propos nauséeux qui font froid dans le dos. Provocation ? Peut-être. Toujours est-il que le résultat est des plus désagréables, dépeignant un univers fait d’immondices et de personnages profondément mauvais, qui ne réagissent pas face au viol d’une camarade de classe, volent sur les lieux d’un crime ou ne savent pas s’exprimer autrement qu’à travers l’insulte et la haine. En gros le discours est assez simple dans Just the Wind : les tziganes sont des parasites à exterminer. Le fait qu’un film aussi maladroit, car on doute tout de même que ce soit là le véritable discours du réalisateur hongrois qui soutiendrait la monstruosité de certains de ses pairs, récolte un prix aussi important dans un festival majeur pose de sérieuses questions et fait tout aussi froid dans le dos que le film lui-même. Et le pire, c’est que Just the Wind pousse cette bêtise, cette maladresse et ce regard nauséabond encore plus loin. Qu’il se pose sur cette pauvre femme qui fait des ménages et vit dans l’espoir de rejoindre son mari, ce lâche parti au Canada (car oui, en plus les tziganes pratiquent la fuite devant les difficultés), passe encore. Qu’il lui fasse subir d’odieuses humiliations aussi, à la rigueur. Mais quand il s’agit de filmer des enfants ou des adolescents, il dépasse allègrement la ligne jaune.

 Just the Wind (Benedek Fliegauf, 2012)

Ce regard de voyeur se transforme en un regard franchement déviant et limite pédophile dès qu’apparaissent des jeunes filles à l’écran. Avec sa mise en scène balourde qui jongle entre les “plans-nuque” dont raffole le cinéma indépendant et les cadres extrêmement serrés sur les personnages, Benedek Fliegauf filme Anna (la jeune Gyöngyi Lendvai) ou Zita (la encore plus jeune Éva Papp) sous toutes les coutures jusqu’à créer une véritable sensation de malaise. En s’attardant longuement sur un corps qui se dénude, un décolleté naissant ou des formes apparentes dans des vêtements près du corps, avec un regard franchement de voyeur, le film devient assez vite répugnant. Cette idéologie douteuse, sans aucune distance et qui place le spectateur dans une position peu ragoutante, se voit en plus doublée d’un véritable problème de cinéma. Jouer à l’auteur c’est sympa sauf quand on ne se rend pas compte de ce qu’on raconte et qu’on le fait à l’envers. Just the Wind est laid jusque dans l’image, avec la quasi totalité du film qui souffre d’un sérieux problème de mise au point. Tout est flou dans Just the Wind, de son propos à son traitement visuel, de la position du réalisateur à celle du spectateur. Tout le monde n’a pas le talent de Pasolini ou de Gaspar Noé pour plonger dans l’horreur, et il est clair que Benedek Fliegauf n’en a pas une miette. Son film est répugnant, et le fait qu’il soit récompensé quelque part l’est tout autant. A moins que son seul objectif soit de chercher le rejet du spectateur qui n’a pas vraiment envie de voir des plans s’attardant sur une jeune fille qui va pisser dans les bois…


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